mercredi 19 novembre 2008

Fait-on le bien pour soulager sa conscience ?


Cher docteur philo,
Je vous consulte afin d'obtenir un semblant de réponse à mes questions, qui, somme toute sont d'une banalité assez désopilante : […] "choisit-on d'accomplir de"bonnes actions" afin de soulager notre conscience ?"

La Boite à questions

Choisit-on d'accomplir de « bonnes actions » :

1er présupposé : en présence du bien, on a le choix de le faire ou de ne pas le faire.

C’est ce que disait Médée : Video meliora proboque, deteriora sequor (Je vois le bien et je l'approuve, et c'est au mal que je me laisse entraîner) – Ovide, Les Métamorphoses, Livre septième (1)

C’est donc que le bien n’a pas un poids suffisant pour déterminer l’action : il faut une cause supplémentaire.

Mais si cette cause existe, et qu’elle n’est pas le bien, est-elle le mal ? Est-on dans l’alternative : ou le Bien – ou le Mal ?

Si c’est le Mal qui nous détermine, alors on pourrait dire en effet que le bien nous sert à soulager notre conscience : tantôt je jouis de faire le mal ; tantôt je me rachète en faisant le bien. Et donc quand je fais le bien, j'ai quand même la petite jouissance vicieuse qu'est l'égoïsme et l'amour de soi. Tout La Rochefoucauld est là. Et le soulagement de la conscience aussi.

Mais on pourrait objecter alors qu’il n’y a pas un bien, mais plusieurs. Ainsi, il y aurait le bien des « bonnes actions » définies et balisées par l’ordre moral. Et puis il y aurait le bien de l’individu, celui qui coïncide avec son mérite, et non avec la médiocrité des actions que tous peuvent accomplir. C’est ainsi que Raskolnikov réclame le droit au crime : Si un jour, Napoléon n’avait pas eu le courage de mitrailler une foule désarmée, nul n’aurait fait attention à lui, et il serait demeuré un inconnu.

Pour la suite sur le bien unique, voir ce post.

afin de soulager notre conscience ?

2ème présupposé : il y a un rachat possible.

Si je fais le mal, je me rachète en faisant une « bonne action ». C’est ainsi que les piétistes pensaient que Dieu devait ouvrir son paradis à tous ceux qui auraient accompli des actions vertueuses au cours de leur existence, quelque soit leur corruption morale par ailleurs.

Objection : on le sait, cette idée n’a pas eu cours chez tous les chrétiens. Les uns prétendent que le repentir est nécessaire, autrement dit que la bonne action ne rachète rien du tout. D’autres (les Jansénistes) estiment même que Dieu seul peut décider en toute souveraineté du rachat, autrement dit qu’on ne peut absolument pas soulager sa conscience, mais simplement accomplir des bonnes actions au cas où Dieu aurait la volonté de nous sauver.

Conclusion de Docteur-Philo :

--> Il y a quelques jours, quelqu’un me demandait : à quoi ça sert la vertu ?

J’ai répondu : la vertu ça sert à être heureux, c'est-à-dire à mériter « l’estime raisonnable de soi ». Estime qu’on s’attribue à soi même pour des bonnes actions, reconnues par nous comme telles.

S’il y a rachat, que je me débrouille avec ma conscience, soit. Mais ça doit être raisonnable, c’est à dire justifiable.

Si c’est Dieu qui décide de ce qui est vertueux ou vicieux, et s’il nous rachète à condition que nous ayons fait de bonnes actions, alors celles-ci entrent dans la morale par la petite porte. Elles n’ont pas plus d’importance que la pénitence au terme de la confession. Tu feras l’aumône aux pauvres – ou alors tu diras trois paters et deux aves.



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