vendredi 23 mai 2008

Que faire pour rester jeune ?

Je m’adresse à vous Docteur-Philo parce que j’ai lu quelque part que pour rester jeune il suffit de mourir jeune. Auriez-vous quelque chose de moins idiot – ou de moins cynique – à répondre ?

Anonyme – Par e-mail

Je vais vous dire quelque chose : moi, Docteur-Philo, quand le matin dans ma salle de bains, je peigne soigneusement ma longue barbe blanche, je me dis : « Heureusement que je ne suis plus jeune ! ». Nos maîtres, de Platon à Descartes ont dénigré la jeunesse, âge de l’incertitude, de la naïveté, de l’erreur. Quand aux théologiens ils n’ont pas arrêté de dénoncer les horribles péchés dont elle est grosse. Et même Freud : « l’enfant est un pervers polymorphe »…

Mais pour vous être agréable, je vais essayer de vous répondre.

--> D’abord, voyez-vous, il faudrait qu’on sache quelle jeunesse vous souhaitez conserver : celle de vos 10 ans ? Ou de vos 20 ans ? Ou encore vos 30 ans ?

La meilleure façon de garder la jeunesse de ses 10 ans, c’est de faire des enfants et leur piquer leurs jouets sous prétexte de jouer avec eux. C’est plus difficile aujourd’hui où les consoles de jeux ont remplacé le train électrique, mains avec un peu de volonté, vous y arriverez, j’en suis sûr.

La même stratégie s’impose pour garder vos 20 ans : attendez donc que vos enfant aient cet âge, et arrangez-vous pour vous insinuer dans la communauté qu’ils vont former avec leurs copains – et leurs copines, oui, je vous vois venir…

Les 30 ans, pas de problème : avec la salle de gym, plus une maîtresse un peu stimulante, je suis certain ça va le faire.

--> Maintenant que je vous ai répondu, à vous de me répondre : quel âge avez-vous ? Votre jeunesse, qu’est-ce qu’elle vous a apporté que votre âge vous interdit ?

Hein ? Malgré la maîtresse stimulante, du Viagra, du Cialis et compagnie, vous manquez de ressort ? Désolé pour vous, mais après tout : est-ce que c’est si important que ça ? Ce que je voudrais vous faire comprendre, c’est que ce qui dans votre jeunesse était important ne l’est peut-être plus pour vous aujourd’hui. Et que ce qui est important aujourd’hui, c’est peut-être quelque chose qui reste malgré tout à votre disposition. Voyager, admirer à deux un coucher de soleil, tomber amoureux (même si Eros a pris un peu d’embonpoint), faire une fête avec des amis : c’est à la portée de tout le monde, pour peu qu’on s’en donne la peine.

Moi je sais bien ce que vous désirez retrouver avec la jeunesse : c’est l’insouciance. Si vous vous sentez vieux, c’est qu’à chaque projet, peut-être même à chaque acte de votre vie, vous sentez la mort – votre mort – qui rôde, qui passe sur l’horizon comme un nuage sur le soleil.
J'exagère? Y a pas mort d'homme? Bon, bon. Disons alors si vous voulez qu'il y a déperdition de quelque chose de substantiel, et voilà tout.

Bref : vous voulez rester jeune : oubliez que vous êtes vieux.

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