Comme toujours ces questions massives portent dans leurs flancs plusieurs autres questions.
- L’enfant qui vient de naître est-il conscient ? Sinon, à quel moment la conscience lui advient-elle ?
- Si la conscience surgit dans l’être humain, lui est-elle liée consubstantiellement, ou bien l’homme est-il un animal susceptible d’apprendre à être conscient comme il apprend à marcher sur ses deux jambes ?
- Faut-il au contraire dire que l’être humain est par définition un être conscient (conscience = âme), au point que le nourrisson dénué de conscience serait à peine un humain (le fœtus dont on peut avorter sans homicide). Là-dessus s’opposent les adeptes de l’âme immortelle (le bébé est une personne dès sa conception) et les psychologiques comme Piéron : « l’enfant n’est qu’un candidat à l’humanité »
- Mais la question préalable est la suivante : à quels signes reconnaissons-nous la conscience ? Comment pouvons-nous répondre à la question qui nous est posée si nous ne savons pas faire la différence entre un être dépourvu de conscience et un être qui en est pourvu ?
--> Sur cette dernière question, je crois que nous ne pouvons répondre que négativement : même l’imagerie cérébrale n’a pas permis de saisir le lieu de la conscience ni même la trace qui atteste de son existence. Même si il y a en effet des différences entre l’action réflexe et l’action réfléchie, rien ne prouve que nous soyons là en présence d’une trace inévitable pour la conscience.
Bergson allait encore plus loin : rien dans mon comportement, au moment même où je vous parle, ne vous prouve indubitablement que j’ai une conscience, disait-il. Et encore ne connaissait-il pas ces programmes informatiques qui simulent un interlocuteur avec le quel on dialogue par clavier interposé, tels qu’on finit par ne plus savoir faire la différence entre l’interlocuteur véritable et la machine.
Donc a fortiori nous ne pouvons savoir si une conscience préformée est dans le nourrisson, comme la rose est dans le bourgeon.
--> Nietzsche est le philosophe hardi qui a osé répondre à votre question. La conscience nous dit-il est le résultat de l’échange et de l’interaction entre l’individu et son milieu, du fait des souffrance qu’il éprouve et qu’il va tenter de supprimer.
Ce qui veut dire que la conscience est la part la plus mauvaise de nous-mêmes puisqu’elle est la part souffrante. La puissance est inconsciente, et elle est ce que l’homme doit devenir.
--> Autrement dit, votre question : « Peut on naître sans conscience ? » conduit à une autre : « Que vaut la conscience ? »
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