vendredi 3 octobre 2008

Comment une croissance peut-elle être négative ?


Je vois que vous êtes comme moi : tout docteur de philosophie que je sois, j’ai mal aux oreilles quand j’entends dire que la récession, est avérée après 2 trimestres successifs de « croissance négative » du PIB.

Croissance négative ? Quésaco ?

En fait, je crois qu’il y a contamination de deux expressions différentes :

- d’une part celle de croissance du PIB, dont chacun s’accordera à dire qu’elle est un accroissement de la richesse d’un pays.

- et celle que les mathématiciens connaissent bien, de progression négative.

En mathématique, une progression est simplement une suite de nombres se déduisant l'un de l'autre par addition d'un nombre constant R. (1) Il ne s’agit donc pas d’un processus évolutif au sens habituel. (2)

Une croissance négative du « produit intérieur brut » affecte donc l’évolution de la richesse d’un pays, mais en suivant une courbe descendante. Ce qui est négatif ici, résulte de la comparaison en pourcentage, des chiffres du PIB d’un trimestre rapporté au chiffre du trimestre précédent.

S’il est inférieur au trimestre précédent, alors on a une « croissance négative », ce qui veut dire qu’on s’appauvrit.

--> Le problème vient de ce qu’on utilise d’une part un terme – la croissance – qui implique une évolution, et donc l’application d’une cause motrice ; et d’autre part une quantité négative qui supposerait qu'une autre cause produise l’effet inverse (comme si en contre-pédalant mon vélo se mettait à reculer). Mais alors, cette cause est tout aussi positive que l’autre, puisqu’il faudrait qu’un effort soit fait pour obtenir cet effet nouveau.

C’est Emmanuel Kant qui a posé le problème le plus clairement. Dans son Essai pour introduire en philosophie le concept de grandeur négative, il explique qu’effectivement il faut distinguer entre la quantité négative en mathématiques et la quantité négative en philosophie (et en physique) : le déplaisir est bien un plaisir négatif, qui résulte d’une cause tout aussi réelle que le plaisir proprement dit. On peut aussi soustraire le déplaisir du plaisir (comme le plaisir engendré par l’achat d’une maison est diminué par le déplaisir résultant des charges à payer), exactement comme on soustrait un nombre négatif d’un positif.

Et on en vient alors à penser : Y a-t-il donc une cause précise qui nous appauvrisse en détruisant de la richesse ?

Ça serait-y pas les fonctionnaires par hasard ?


(1) Dans le cas de la progression arithmétique. S’il s’agit d’une progression arithmétique. S’il s’agit d’une progression géométrique, alors il faut lire : suite de nombres se déduisant l'un de l'autre par multiplication par un nombre R.

(2) On trouve une autre définition de la progression négative

Progression négative - une stratégie de parier dans la roulette où chaque fois que vous perdez, vous augmentez la quantité de pari sur la prochaine rotation. Ce s'appelle la progression négative parce que l'augmentation est basée sur des résultats négatifs précédents.

On espère que ça n’a absolument aucun rapport avec une quelconque stratégie économique.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Dans la croissance, les effets positifs et négatifs sont inhérents, mais les effets positifs sont rétrogader vers le négatifs par l'importance des effets négatifs, ce qui donne une croissance négative qui est, si on observe dans la globalité, une régression

Anonyme a dit…

hum...

Anonyme a dit…

Docteur Philo a dit... "Y a-t-il donc une cause précise qui nous appauvrisse en détruisant de la richesse ? Ça serait-y pas les fonctionnaires par hasard ?"
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Sacré docteur... obligé d'appeler Kant à la rescousse pour aboutir à une si magistrale conclusion... un tour de philosophe au dessus de tout soupçon à ses propres yeux.
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signé : Amal Game.