jeudi 11 septembre 2008

Peut-on remonter le temps ?


Après H.G. Wells et la machine à explorer le temps, après l’élixir de jeunesse, voilà la question qui revient, sans doute parce qu’on nous rebat les oreilles avec l’accélérateur de particules L.H.C., qui, dit-on, doit nous ramener à quelques fractions secondes du Big-Bang, il y a de cela 14 milliards d’années.
Pour savoir ce que ça veut dire, il faudrait déjà comprendre de quel temps il s’agit.
1 – Le temps du souvenir. Ainsi le petit Marcel (1) qui vit un épisode de son enfance en buvant du tilleul avec des miettes de madeleine dedans. Admettons qu’il n’y ait aucune différence entre l’épisode vécu et le souvenir qui en revient, il n’en reste pas moins que le souvenir est non pas la vie, mais la reviviscence. C’est Combray-II, le Retour. Avec le souvenir vécu, vient la conscience que ce n’est qu’un souvenir – sinon on hallucine.
2 – Le temps du physicien. Dans les équations de la mécanique le paramètre temps est élevé au carré (t2) ce qui signifie que le temps est réversible. L’instant (-2) peut devenir l’instant (+2). Hier peut devenir aujourd’hui, ou demain, sans problème.
Explication ? Supposez que vous fassiez rebondir une balle élastique sur le sol : elle part de votre main et elle y revient : le bond et le rebond. Vous allez dire que le « rebond » est l’effet du « bond », et donc il y a une flèche du temps : la cause précède toujours l’effet, c’est même à ça qu’on la reconnaît.
Mais supposez maintenant que vienne un physicien, avec ses instruments de mesure, qui vous dise : le mouvement de votre balle est strictement identique à l’aller comme au retour. Vous avez créé un mouvement perpétuel, votre balle va rebondir sur le sol ad vitam eternam. Dès lors, l’effet et la cause se confondent : pourquoi ne dirait-on pas que c’est le « rebond » qui est la cause du « bond » ? En tout cas ça ne change rien aux calculs de la physique.
3 – Le temps de l’univers est pour autant qu’on le sache un temps de l’entropie. Hier et demain se distinguent de façon définitive par le fait que l’énergie s’y disperse (Big Bang). Il y a donc une flèche du temps, son écoulement est irréversible, et les calculs de la mécanique ne s’appliquent pas à cette grosse machine là.
Sauf si celui-ci après s’être dilaté comme une baudruche se dégonfle et se contracte (Big Crunch). Le temps s’inverse, et alors on peut le remonter.
Supposez que le petit Marcel laisse tomber sa tasse de tilleul. Elle se brise à ses pieds. Dites lui alors qu’il n’a pas besoin de ramasser les morceaux. Il suffit d’attendre assez longtemps, et ceux-ci reviendront tout seuls dans sa main.


(1) Proust (évidemment) – Du coté de chez Swann. (Et aussi le temps retrouvé)

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