samedi 27 février 2010

Que peut-on répondre au pessimisme ?

Bonjour Docteur Philo. J'ai peur d'être assez d'accord avec Schopenhauer et je voulais savoir ce qu'on peut rétorquer à son pessimisme, qu'est-ce que lui ont rétorquer les grands philosophes et ce que vous en pensez. Il me plairait d'embrasser une autre philosophie que la sienne, encore faudrait-il me convaincre... Merci beaucoup


Question : si vous n’êtes pas pessimiste, êtes-vous nécessairement optimiste ?

Examinons les alternatives au pessimisme.

a – L’optimisme.

Je ne ferai pas un exposé sur le sujet de l’optimisme, je me contenterai d’une référence à Leibniz, qui en est un représentant particulièrement connu : Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Je dirai simplement que l’optimisme suppose un engagement, une croyance en un principe organisateur du monde (un Dieu, un Grand architecte, l’histoire matérielle des hommes (Marx), ou qui vous voudrez) qui garantit sa perfection ou du moins sa moindre imperfection. Il garantit aussi sa cohérence et sa pérennité.

Disons pour en terminer avec ce cas, que ceux qui ne croient pas à un tel principe disent qu’on doit tout de même faire comme si c’était vrai, car sans cela la morale – qui rétribue les bonnes et les mauvaises actions – ne serait pas possible. C’est Kant qui illustre cette option.

b – Le matérialisme antique.

Je pense que l’optimisme comme le pessimisme d’ailleurs a disparu de notre horizon avec la faillite du marxisme. Comme le dit Sartre, on ne mous a rien promis, et d’ailleurs on ne nous a menacé de rien non plus. Nous sommes libres de faire notre trace dans le monde (1), et puis un beau jours, nous disparaissons comme la bulle de savon qui éclate, et c’est terminé.

Si je me réfère à l’histoire des idées, je trouve ici Épicure.

Selon lui, les dieux sont trop loin de nous pour intervenir dans notre vie, ils ne s’occupent donc absolument pas de nous ; d’ailleurs ils ne nous ont pas créés – seul le hasard est notre origine. On n’a donc pas à redouter leur colère, pas plus d’ailleurs qu’à compter sur eux pour améliorer notre sort. La souffrance est le seul mal que nous ayons à craindre, et la première de toutes nos souffrances, c’est la crainte que nous en avons. (Pensons au rôle attribué aujourd’hui au stress pour comprendre le message épicurien.) Notre mal est en nous, il n’est autre que notre peur du mal. Et ainsi, la mort n’est pas à redouter, car, puisqu’elle nous supprime elle ne nous concerne pas : c’est la peur de la mort qui est mortifère.

c – Conclusion.

L’optimiste et le pessimiste se donnent la main pour affirmer que la vie est toute tracée, qu’il ne sert à rien de lutter, que tout était déjà dit avant même notre naissance (Inch Allah...). Ce sont des philosophies paresseuses.

Je propose donc l’épicurisme comme alternative à ces options, et je remarque que je ne suis pas le seul – pensons à Michel Onfray cet inlassable adepte du matérialisme grec.


(1) Pour Sartre, la liberté n'est pas de faire ce dont on rêve, mais "de faire quelque chose avec ce qu'on a fait de nous".